Plus qu’un artifice architectural, le premier clocher du Collège, c’était l’acceptation formelle de la population du village au projet du docteur Meilleur, mais plus encore le lien essentiel et le symbole de l’ouverture du Collège sur son environnement social et économique.
À la suggestion du docteur, un menuisier réalise l’ouvrage en remboursement d’une dette contractée envers le Collège. La croix qui en couronne la petite coupole, vestige rouillé gisant sur les terrains du cimetière, a été donnée au docteur par les marguilliers de la paroisse. Il se chargera de la faire restaurer. La cloche sera achetée d’un fondeur avec les sommes recueillies par le docteur, porte à porte, auprès des dames du village.
La cloche du Collège marque de ses tintements tout le déroulement des activités quotidiennes. Elle sonne la fin des récréations, le début et la fin des heures de repas, l’Angélus du matin et du soir, l’heure de la montée au dortoir et, bien sûr, à la volée, les grands moments civils et religieux de l’année scolaire.
À une époque où la montre bracelet n’avait pas encore été inventée et où la montre de poche était réservée aux bien nantis, ce sont les cloches des églises qui marquaient le temps, les grands moments de la vie et appelaient les grands rassemblements des citoyens du village, pour assister à la messe, pour annoncer un décès, pour célébrer un baptême, un mariage et des funérailles. Le battant de la cloche était même sollicité pour appeler les pompiers volontaires sur le lieu d’un incendie. À cette époque, les cloches parlaient et leur silence, s’il se prolongeait, inquiétait.
On peut penser que celle du Collège avait aussi son langage propre. Aujourd’hui, la cloche du dôme du Collège ne sonne plus, mais il faudrait peu de chose pour qu’elle résonne à nouveau.
René Didier (127e)